Excel. Oui, Excel. Le tableur de nos bilans financiers, des listings interminables de fournisseurs ou de la planification annuelle des congés estivaux. Loin de l’aura glamour d’un logiciel de design ou de présentation, Excel a longtemps été cantonné à un univers strictement utilitaire. Pourtant, loin de ces lignes austères et de ces cellules millimétrées, un phénomène aussi surprenant qu’inspirant est en train d’émerger : l’art avec Excel.
Non, vous ne rêvez pas. Excel est en train de tracer sa route – ou devrait-on dire, sa grille – dans les sphères de la création graphique. Et rassurez-vous : nul besoin d’être un(e) virtuose du tableau croisé dynamique pour apprécier la richesse de cette nouvelle forme d’expression visuelle.
Excel, un canevas inattendu
Ce qui rend Excel si intrigant dans un contexte artistique, c’est justement son côté répétitif, structuré et… limité. Dans les bons esprits, les contraintes sont souvent le ferment de la créativité. C’est ainsi qu’une communauté d’artistes, d’amateurs éclairés ou simplement de curieux enthousiastes, s’est mise à explorer les possibilités esthétiques d’un outil pensé à l’origine pour le calcul budgétaire.
Vous souvenez-vous de ces moments où vous coloriiez frénétiquement des cellules pour distinguer les lignes importantes ? Imaginez maintenant cette pratique poussée à l’extrême. En jouant avec les cellules comme des pixels, certains créateurs parviennent à former des portraits hyperréalistes, des paysages abstraits ou encore des œuvres pop incroyablement précises – le tout, directement depuis une feuille Excel.
Qui sont ces artistes du tableur ?
Peut-être avez-vous déjà croisé le travail de Tatsuo Horiuchi. Ce Japonais à la retraite s’est lancé dans l’art numérique sur Excel avec l’idée malicieuse d’éviter les coûts liés à l’achat d’un logiciel de graphisme. À l’aide des courbes de Bézier intégrées aux fonctions de dessin, il réalise aujourd’hui des paysages japonais traditionnels avec une finesse qui ferait pâlir Monet lui-même (ou du moins, lui soutirerait un haussement de sourcil admiratif).
Autre exemple savoureux : celui de Danielle Aubert, designer américaine, qui a publié un ouvrage retraçant plusieurs années de création uniquement dans Excel. Elle y exprime toute la poésie géométrique du tableur, en jouant sur les textures, les motifs et les itérations colorées.
Alors non, ce mouvement n’est pas (que) le fruit de quelques esprits excentriques : c’est un véritable courant artistique en train d’éclore dans les recoins inattendus de notre quotidien numérique. Et surtout, il nous rappelle que l’outil ne limite pas la création, bien au contraire : il la redessine.
Une esthétique du pixel… sans Photoshop
Travailler dans Excel, c’est un peu comme peindre avec des pixels. Sauf qu’ici, chaque pixel est une cellule. Imaginez un tableau de 100 colonnes par 100 lignes : vous voici devant un canevas de 10 000 « minuscules carrés » à colorier un à un, pour y faire émerger une image.
Cela demande évidemment temps et patience. Mais aussi une étonnante compréhension du rendu à moyenne et grande échelle. Car à l’instar des mosaïques ou des œuvres pointillistes, ce n’est que lorsqu’on prend du recul qu’apparaît la magie. Un peu flou de près, saisissant de loin.
Et les possibilités ne s’arrêtent pas à la mise en couleur de cellules. Excel propose également des outils de formes automatiques, de tracés, d’objets groupés, et même des formules pour créer des motifs algorithmiques : c’est là que le code flirte avec l’esthétique.
Excel dans la communication visuelle : une idée saugrenue ?
Pas tant que ça. En tant qu’agence spécialisée en PowerPoint, design et persuasion visuelle, on aime cultiver un œil curieux. Et on vous le dit : les passerelles entre Excel Art et la création de contenus pour une réunion ou une présentation sont bien réelles.
L’art dans Excel enseigne, de manière détournée mais puissante, des principes fondamentaux :
- La discipline du détail : chaque pixel compte, chaque cellule colorée ou non influence le rendu final. Une philosophie qui s’applique merveilleusement bien à la conception de slides percutantes.
- La logique dans la créativité : quand les contraintes deviennent moteurs d’innovation. En design comme en storytelling visuel, trop de libertés peuvent mener… au néant esthétique.
- L’équilibre entre structure et émotion : Excel impose une grille. À nous d’y injecter du sens, de l’émotion et parfois, une touche d’humour bienveillant (comme on aime le faire ici).
Alors, que vous soyez graphiste aguerri, orateur en quête de différenciation ou simple amateur d’expériences visuelles décalées, peut-être est-il temps de questionner vos a priori.
Un outil pédagogique insoupçonné
Imaginez un instant : vous débutez un atelier d’équipe sur la créativité. Au détour des sempiternels conseils sur le brainstorming, vous sortez un visuel réalisé uniquement dans Excel. Effet de surprise garanti. L’outil devient alors un moyen de casser les routines mentales et d’ouvrir un autre regard sur les outils du quotidien.
Excel art peut aussi servir à démocratiser la création graphique. Car soyons honnêtes : tout le monde ou presque sait ouvrir Excel. Et cela abaisse considérablement la barrière d’entrée vers l’acte de créer. Pas besoin de tablette graphique, d’abonnement Adobe ou de maîtrise des calques : juste une feuille vierge et un peu d’imagination.
Envie d’essayer ? C’est plus simple que vous ne le pensez
Commencer dans l’art Excel ne demande que peu de choses :
- Redimensionnez les cellules pour qu’elles deviennent des carrés parfaits.
- Utilisez l’outil de mise en forme pour colorier manuellement les cellules.
- Pour les plus techniques, couplez avec des fonctions conditionnelles pour automatiser certains motifs (grâce à des `SI()` bien dosés ou des tableaux aléatoires de couleurs).
Et si vous avez un petit penchant pour la data-visualisation ou les slides ingénieuses, pourquoi ne pas injecter un peu d’art Excel dans vos présentations PowerPoint ? Une miniature pixelisée 100% Excel insérée dans une slide : voilà une accroche visuelle dont vos spectateurs se souviendront.
PowerPoint et Excel : même combat ?
Pas exactement. Mais ils sont de la même famille. Des outils souvent décriés, sous-estimés, cantonnés à leur rôle utilitaire. Et pourtant : avec un brin d’audace, ils deviennent des scènes créatives à part entière. Ce que certains font avec les cellules, d’autres le font avec les formes et animations dans PowerPoint. Ce sont, en somme, deux terrains de jeu qui méritent d’être (re)découverts.
Alors, la prochaine fois que vous ouvrez Excel, prenez un instant. Respirez. Et demandez-vous : « Et si aujourd’hui, au lieu de trier des colonnes… je peignais ? »
Car parfois, entre deux formules, un monde inattendu peut surgir. Celui où le pixel devient poésie, et la cellule, une œuvre en devenir.
